Bascule ADELI vers RPPS pour les psychologues
2 juin 2024Pourquoi l’immense majorité des psychologues boycottent le dispositif MonSoutienPsy ?
16 juillet 2024L’indispensable maintien du boycott du dispositif MonSoutienPsy
Le dispositif MonSoutienPsy se refait une beauté, il se pare de ses plus beaux atours pour séduire de plus nombreux psychologues, les précédentes versions ayant donné lieu à un boycott massif de la profession.
Certes, les conditions évoluent, le nombre de séances passent de 8 à 12 par année civile, il n’est plus indiqué devoir passer par une prescription médicale. Néanmoins, une durée minimale des séances (paramètre impossible à évaluer) est introduite (de 45 minutes à 1 heure), ne permettant pas au psychologue d’exercer son droit de choisir ses méthodes.
Les critères d’inclusion et d’exclusion sont quant à eux toujours aussi restrictifs, tant pour les mineurs que les majeurs.
Les mineurs, enfants et adolescents de 3 à 17 ans doivent présenter une situation de mal-être ou souffrance psychique d’intensité légère à modérée uniquement, et pouvant susciter l’inquiétude de l’entourage (famille, milieu scolaire, médecin, etc.).
Cela remet en cause l’autonomie décisionnelle d’un mineur de déterminer, (en plus du rôle parental qu’il convient de conserver), du bien-fondé d’une rencontre avec le psychologue, même si un psychologue n’engage pas de suivi de mineur sans l’autorisation parentale.
La compétence du psychologue est gravement remise en cause dès lors que sont exclus du dispositif toute autre situation dont la liste est longue :
• risques suicidaires ;
• formes sévères de troubles anxieux ou dépressifs ;
• troubles graves du comportement alimentaire ;
• situations de retrait et d’inhibition majeures ;
• troubles neuro-développementaux ;
• toute situation de dépendance à des substances psychoactives ;
• troubles du comportement sévères : exclusions scolaires à répétition ; retentissement majeur sur la scolarité, les apprentissages, la vie familiale ; comportements et gestes agressifs envers les autres ayant débouché sur une arrestation ou condamnation…
Autre frein : en cas de désaccord des parents quant à la nécessité d’un suivi psychologique du mineur, le suivi n’est plus possible puisque l’autorisation des deux parents et non plus l’information, est désormais exigée.
Le dispositif rend de plus inopérant toute collaboration entre un psychologue et un pédopsychiatre que souhaiteraient établir les professionnels ou les parents d’un mineur puisque sont aussi exclus: les enfants et adolescents actuellement en cours de prise en charge en pédopsychiatrie ou psychiatrie ou en affection longue durée (ALD) pour motif psychiatrique (ou dans les 2 ans).
Une hiérarchie de principes de prises en charge des problématiques de santé mentale est au cœur du dispositif, réservant les problématiques les plus lourdes aux médecins psychiatres et accordant aux psychologues des prises en charge considérées à tort comme plus légères.
Cette philosophie néo-libérale fractionne tout travail d’élaboration d’une collaboration interdisciplinaire qui devrait être à l’œuvre entre les services publics et le libéral.
Dans le cas des majeurs, les critères sont toujours aussi contestables car le dispositif s’adresse aux patients adultes de 18 ans ou plus en souffrance psychique qui présentent uniquement :
• un trouble anxieux d’intensité légère à modérée ;
• un trouble dépressif d’intensité légère à modérée ;
• un mésusage de tabac, d’alcool et/ou de cannabis (hors dépendance) ;
• un trouble du comportement alimentaire sans critères de gravité
La position prise par la CPAM d’évoquer un mésusage du tabac et du cannabis, laisse à penser qu’il pourrait exister des normes médicales validant la consommation de ses produits comme il en existe chez l’adulte pour l’alcool. C’est à n’en pas douter une formulation inadaptée et involontaire mais qui ajoute à la défiance de psychologues accompagnant des patients souffrant d’addiction.
La CPAM indique sur son site que dans la grande majorité des cas de souffrance psychique légère à modérée, 12 séances d’accompagnement suffisent pour que votre situation s’améliore.
Cette formulation, une nouvelle fois est réductrice et non conforme à la pluralité des pratiques et des situations rencontrées en libéral. Les psychologues sont dotées d’une formation universitaire de haut niveau qui leur permet de définir la nature de leur intervention, le terme d’accompagnement psychologique ne devant pas se substituer à celui de psychothérapie.
Les deux premières années du dispositif n’ont pas permis de résoudre l’absence d’investissement dans des services publics de qualité, l’investissement supplémentaire dans l’élargissement du nombre de séances et le passage de 30 à 50 euros ne sont pas des leviers efficaces car bon nombre des patients restent à la porte de ce dispositif.
Les psychologues, vraisemblablement plus nombreux à adhérer à cette nouvelle formule auront à assumer une part de responsabilité morale dans la paramédicalisation de notre profession, de remise en cause de notre autonomie et d’accélération dans la destruction des services publics.
Notre association défend la place de la souffrance psychique dans la cité. Cette conception du soin psychique ne se résume pas à un inventaire de troubles médicaux ou de dysfonctions. Nous nous battons et résistons pour un modèle de société.
Compte tenu de tous ces éléments, l’Association M3P, Mouvement des Psychologues Cliniciens et Psychologues Psychothérapeutes appelle au maintien du BOYCOTT du dispositif MonSoutienPsy (et dispositifs apparentés, financés par la CPAM : PCO, SESAME etc…) et invite les psychologues à la plus grande prudence face à ces aménagements de forme qui ne remettent pas en cause la dévoiement de la relation directe du patient et du psychologue, indépendamment des contraintes économiques pouvant en modifier les conditions.