Chronique du 11 août 2025
11 août 2025Chronique du 18 août 2025
Le soin est Agapè !
Kyd Shepherd – Psychologue clinicien – Adhérent M3P
Les logiques contemporaines ont cette triste idée que soigner n’est qu’une affaire de technique, de méthode. Une illusion, qui précipite un fourvoiement que trouver le « bon » outil et la réparation ne sera qu’une conclusion courue d’avance. Ainsi, la technique devient reine ou plutôt tyran d’un monde qui se fonde sur les statistiques, les chiffres, la rentabilité et le général à l’exclusion du singulier, de l’unique et de l’humain.
Mais ces logiques peuvent-elles réellement soigner ? Je ne le pense pas, elles ne peuvent que réparer est encore si elles y arrivent alourdi par une telle tyrannie du chiffre. Soigner, guérir me semble être un processus d’une grande profondeur loin des logiques contemporaines. Soigner n’est pas juste un « acte » c’est un mouvement qui engage le clinicien et le patient bien au-delà de toutes méthodes ou certitude « scientifique ». Soigné c’est prendre le temps d’accompagner et « d’aimer » le patient. Un sentiment que la langue française peine à cerner tellement la notion d’amour est vaste.
Ainsi, si le lecteur me le permet je souhaiterai préciser ma pensée en employant le mot d’Agapè (ἀγάπη), un mot qui vient du grec ancien est qui signifie l’amour désintéressé par le gain matériel, social ou romantique, un amour de la personne pour ce qu’elle est. L’Agapè marque le plus profond des respects de l’autre et de son humanité, vouloir son bien-être au-delà de toute transaction.
C’est L’Agapè que nous ressentons envers nos patients qui les invitent à s’engager en temps, en énergie et en profondeur pour faire l’expérience d’une psychothérapie. Cet Agapè est anti réductionniste et ne peut se résumer à une « simple » méthode ou technique ni se délimiter à un nombre prédéfini d’« acte ».
Faire preuve d’Agapè c’est témoigner de son respect envers l’autre, c’est refuser de l’emmurer dans un diagnostic, de le réduire à ses symptômes. L’Agapè c’est d’essayer de comprendre la personne qu’on accueille et de reconnaître qu’on y parvient que partiellement. L’Agapè c’est accepter l’absolue complexité de l’être et résister aux attaques déshumanisantes de classification et de réduction de la psychothérapie à un but de « solvabilité ». Mais L’Agapè c’est aussi travailler avec la colère, l’impatience, le vécu, l’histoire, l’inconscient, les triomphes et les échecs… C’est rendre aux patients ainsi qu’à nous-même notre infini profondeur d’être humain.
Enfin faire preuve d’Agapè c’est être dans l’accueil et l’accompagnement de tous, quelque soit le niveau de souffrance psychique sans juger et sans discriminer.
Ainsi, le clinicien se doit de lutter contre l’émergence d’une pseudo-science qui se cache derrière les statistiques et l’effacement de la complexité, de la multiplicité du subjectif dans le but de singer la forme de la connaissance à défaut d’en comprendre le fond. Une logique incapable d’humanité et donc inapte au rétablissement car soigner c’est aimer !